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Les Chroniques absurdes
25 octobre 2012

Hors-Série : Le Baiser ou la Cuisse

 

The_frog_princess_by_cathydelanssay

Chambre de la princesse Anita. Un lit à baldaquin garni de coussins roses occupe la plus grande partie de l'espace. La Princesse est assise sur le lit, une grenouille dans les bras.

ANITA (émue) : Oh ! Léonard ! Mon doux Léonard ! Que ne vous ai-je reconnu plus tôt ! J'aurais accédé de bon cœur à votre requête, et d'un simple baiser je vous aurais permis de retrouver forme humaine. Maintenant que vous n'êtes plus, me voilà seule, enfermée dans ma chambre par mon horrible belle-mère. Oh, mon doux Léonard, si vous étiez encore de ce monde, je suis sûre que vous me protégeriez. (Elle s'énerve) Vous embrocheriez l'immonde garce d'un coup d'épée, à n'en point douter.

Oh ! Léonard ! Je voudrais tant pouvoir revenir en arrière, avant que la bougie ne s'éteigne. Mais qui aurait sérieusement pu croire à votre histoire ? Voyez-vous souvent des grenouilles venir vous parler de métamorphoses, de contre-sorts à base de baisers et de chandelles magiques déterminant le temps imparti? Ce n'est que lorsque la bougie s'est éteinte et que vous avez rendu l'âme dans mes bras au même instant que j'ai compris que tout ce que vous racontiez était vrai. Oh ! Léonard ! Saurez-vous me pardonnez là où vous vous trouvez maintenant ?

Dans les bras de la princesse, la grenouille s'agite.

LÉONARD (faiblement) : Ma chère et tendre Anita, je ne suis pas mort.

Surprise, Anita lâche Léonard, qui tombe au pied du lit.

ANITA : Miséricordieux ! Léonard ! Vous êtes vivant ?

LÉONARD : Il semblerait, ma belle. Il semblerait.

Anita reprend Léonard dans ses bras et le pose sur le lit.

ANITA : Vous m'avez fait une peur bleue. Je pensais vous avoir perdu. Dans mon désespoir, j'étais prête à me saisir du tournevis dont je ne me sépare jamais et à m'en servir pour mettre fin à mes jours.

LÉONARD : Oh ! Anita ! N'y pensez plus . Je vous interdis d'en venir à de telles extrémités.

ANITA : Maintenant que vous êtes avec moi, jamais plus je n'y repenserai.

Les deux amoureux échangent un baiser. Léonard garde sa forme de grenouille.

ANITA : Léonard, je ne comprend pas. Pourquoi ne vous êtes vous pas transformé à nouveau ?

LÉONARD : La bougie s'est éteinte. Je suis condamné à demeurer une grenouille pour le restant de mes jours. J'espère que cela ne vous posera pas de problème. J'ai de grands projets pour nous deux, ma chère Anita. Long silence. Anita pâlit. Anita, que se passe-t-il ? Je vous sens perturbée. N'avez vous rien à dire ?

ANITA (agitée): Et si on jouait aux échecs ? Je possède un magnifique échiquier en émail avec toutes ses pièces !

LÉONARD (suspicieux) : Anita ! N'essayez pas de changer de sujet.

ANITA (encore plus agitée) : Et cette télévision ! Mon père l'a fait importée d'un pays très lointain ! Anita essaie d'allumer la télévision, mais rien ne se passe. Grand Dieu, je ne comprend pas comment marche cette étrangeté !

LÉONARD (avec autorité) : Anita ! Cessez-donc vos âneries et dites-moi ce que vous avez sur le cœur !

ANITA (après un court silence) : Oh, Léonard ! Mais vous êtes une grenouille !

LÉONARD : N'avez-vous pas dit à l'instant que vous regrettiez de vous être fiée aux apparences et de ne pas m'avoir embrassé plus tôt? Seriez-vous prête à refaire déjà les mêmes erreurs ?

ANITA : Oh ! Léonard ! J'ai lu dans La Nouvelle Princesse daté de la semaine dernière que les grenouilles étaient sujettes à tout un tas de maladies et infections. Vous comprenez bien que je ne peux dès lors pas m'engager avec vous. Pensez à notre progéniture. A-t-on déjà vu une grenouille et une princesse donner naissance à de jolis princes ? Non, mon doux Léonard ! Et ma Belle-mère ne me laissera sortir que si je lui donne la garantie que la lignée de mon père continuera. Elle se met à pleurer. Notre histoire est impossible Léonard.

LÉONARD : Anita, vous me décevez énormément. Puisque c'est ainsi, je vous laisse seule avec votre tournevis.

Léonard saute vers la fenêtre par laquelle il disparaît. Anita reste un moment sur le lit à sangloter. Elle se dirige vers la porte de la chambre.

ANITA : Vous pouvez entrer, il est parti.

Gervienne, la belle-mère d'Anita, entre dans la pièce.

GERVIENNE : Anita, vous êtes décidément pleine de ressources. Vous a-t-il cru ? A-t-il soupçonné une seule seconde le piège dans lequel il est tombé ?

ANITA (faiblement) : Non. Je pense qu'il ne reviendra pas.

GERVIENNE : Bien, en voilà un de moins. Passons au suivant. Bientôt nous aurons transformé tous les princes de ce monde en grenouilles.

ANITA (timide): Si je puis me permettre, pourquoi faites-vous tout cela ?

GERVIENNE : Ma chère Anita, si vous étiez née en France, vous ne me poseriez pas cette question. Sachez qu'il n'est pas de met plus raffiné que la cuisse de grenouille. Et j'en raffole, surtout quand elle est « royale » !

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Commentaires
T
Merci en tout cas ^^
T
Comment t'as su que j'avais publié un nouvel article? Tu as une alerte mail?
N
j'aime j'aime!!! beaucoup ri!!! :D
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